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Les personnes qui reçoivent un « don manuel » (bijou, tableau, espèces) n’ont aucune obligation de révéler celui-ci à l’administration fiscale, en vertu de l’article 757 du code général des impôts, sauf si elles sont appelées à la succession du donateur (article 784).
Les donataires sans lien successoral ne sont toutefois pas à l’abri d’une taxation : en dépit d’une condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’homme, l’administration considère qu’elle peut, à tout moment, par exemple lors d’un contrôle, ou après avoir reçu un renseignement, forcer une « révélation », qui générera une taxation.
Les héritiers qui n’ont pas révélé un don manuel lors de leur déclaration de succession peuvent-ils, de même, être poursuivis ad vitam aeternam ? Telle est la question que pose l’affaire suivante.
Au cours des années 1990, un père, A-X, donne à ses deux nouveau-nés la nue-propriété d’un tableau, Le Concert, du Hollandais Gerrit van Honthorst (1592-1656), dont il se réserve l’usufruit. Mais il ne le déclare pas au fisc. Le 23 septembre 2008, il décède. Sa déclaration de succession ne fait pas mention du tableau, oublié (en dépit de sa beauté) dans une armoire.
En 2011, un expert le trouve, et l’évalue à 1,5 million d’euros. Comme il est devenu inassurable, les enfants le vendent à une société luxembourgeoise, Mieris Establishment, par l’intermédiaire du cabinet Eric Turquin, moyennant quelque cinq millions d’euros, sur lesquels ils paient une taxe forfaitaire de 6,5 %, avant de faire une déclaration à l’ISF. L’administration fiscale les interroge sur l’origine de leurs gains, et referme leur dossier.
En 2013, le tableau est revendu 20 millions d’euros par la société luxembourgeoise, à la National Gallery de Washington. L’oncle des X, qui l’apprend par la presse, assigne ces derniers, en soutenant qu’ils lui doivent la moitié de ce montant, le tableau ayant selon lui été « omis », en 2011, du partage des biens qu’il détenait en indivision avec leur père.
Les neveux répliquent que, depuis 1988, ce tableau, alors évalué à 50 000 francs, soit 7 622,45 euros, n’appartenait plus qu’à leur père, leur oncle ayant en contrepartie reçu celui d’un autre Flamand, David Teniers, alors évalué à 30 000 francs, soit 4 573,47 euros, ainsi que des meubles.
Ils obtiendront gain de cause, le 20 décembre 2017. Mais, en mai 2016, le tribunal de grande instance de Paris, soupçonnant une fraude fiscale, informe la direction des finances de la capitale de cette affaire (comme le lui impose l’article L 101 du Livre des procédures fiscales).
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